Portrait de Julius Kambarage Nyerere

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Julius Kambarage Nyerere est né en avril 1922 à Butiama, au nord de la République-Unie de Tanzanie. Il est le fils d’un chef zanaki. Instruit par des missionnaires catholiques, il est baptisé à 20 ans. Après avoir reçu une formation pédagogique du Collège de Makerere, en Ouganda, il enseigne jusqu’en 1949, date à laquelle, grâce à une bourse du gouvernement, il s’inscrit à l’Université d’Edimbourg ; il est alors le premier ressortissant tanganyikais à fréquenter une université britannique. En 1952, il obtient sa maîtrise d’histoire et d’économie politique et revient enseigner dans son pays.

Pendant ses études à Edimbourg, il traduit en kiswahili le Jules César de Shakespeare. En 1954, il fonde l’Union nationale africaine du Tanganyika (TANU) dont il est élu président. Il siège brièvement au Conseil législatif du Tanganyika en 1954 et en 1957. Abandonnant l’enseignement pour se consacrer à plein temps à la politique, il se fait l’ardent défenseur de l’indépendance du Tanganyika à l’Organisation des Nations Unies en 1955 et 1956. Il est élu au Conseil législatif en 1958 et réélu en 1960, date à laquelle le TANU obtient soixante-dix sièges sur soixante et onze.

Julius kambarage nyerereNyerere dirige le premier cabinet ministériel du Tanganyika et est nommé premier

ministre lorsque le pays accède pleinement à l’indépendance en décembre 1961. En janvier 1962, il démissionne pour se consacrer au parti. Au mois de décembre suivant, lorsque le Tanganyika devient une république, il est élu président, et il devient président de la République-Unie de Tanzanie après la fusion du Tanganyika et de Zanzibar en 1964. La philosophie de Nyerere est de revendiquer l'unité africaine : « Sans unité, les peuples d'Afrique n'ont pas de futur, sauf comme perpétuelles et faibles victimes de l'impérialisme et de l'exploitation. »

Soucieux d’accélérer l’émancipation des Africains par rapport au monde occidental, inspiré par les expériences communistes en Chine, Nyerere s’engage résolument dans une politique socialiste. En février 1967, lors de la déclaration d'Arusha, il définit les principes et doctrines qu’il souhaite voir suivre par le pays. Selon l’idéal de Nyerere, tout cela doit conduire à la création d’une société égalitaire, juste, solidaire, qui trouve dans ses propres ressources les moyens de son autosuffisance. L’éducation est la priorité numéro un. Il faut dire qu’il y a urgence dans ce domaine : la Tanzanie ne produit à cette époque que 120 diplômés par an.

Les premières mesures concrètes d’application de cette politique ne tardent pas à arriver. Les principales industries et sociétés de services sont nationalisées, les impôts augmentés pour une plus grande répartition des richesses. C’est sur le plan de l’agriculture, principal secteur économique du pays, que les changements sont les plus forts. Appelé Ujamaas, c’est-à-dire cofraternité, des communautés villageoises sont organisées sur des principes collectivistes. Des incitations financières encouragent la formation de coopératives. Les premiers résultats sont décevants, et le premier choc pétrolier de 1973 assombrit fortement les perspectives économiques du pays. À Zanzibar, l’Afro-Shirazi Party mène une politique implacable et totalitaire, à tendance ouvertement révolutionnaire. Les propriétés arabes et indiennes sont nationalisées. Quelques désaccords apparaissent même entre Nyerere et Karume, ce dernier voulant se rapprocher davantage du monde communiste que le président tanzanien qui cherche lui à ménager au maximum les relations avec les Occidentaux.

En 1972, Karume est assassiné, pour des motifs qui restent assez obscurs.

Julius nyerere greets cuban president fidel castro

Pendant ces années, boycottées par les occidentaux, la Tanzanie reçoit l’aide de la Chine, qui souhaite pour sa part augmenter son influence en Afrique de l’est. C’est avec un soutien chinois que la ligne de chemin de fer TAZARA (ou TANZAM) de Dar-es-Salaam à la Zambie est construite en 1975. C’est aussi sur le modèle des communes chinoises que sont créés 800 villages collectifs, regroupant des populations d’origine ethniques et tribales différentes, et déplacées de force en camion. On estime qu’en 4 ans, de 1973 à 1976, 9 millions de personnes sont ainsi déplacés. Cette politique, dont on ne peut nier qu’elle permet un certain brassage entre les différentes ethnies qui composent la population tanzanienne, casse brutalement les repères humains et communautaires des individus.

Avec les sanctions occidentales et divers changements, ces politiques dirigistes apportent de moins en moins les résultats escomptés. Les productions manufacturière et agricole régressent, la planification de l’économie par l’administration est inefficace.

Sur le plan politique, les partis (le TANU de Nyerere et l’ASP) se rapprochent et fusionnent en 1977 pour former le Chama cha Mapinduzi (CCM), c’est-à-dire le parti de la Révolution.

Les relations de la Tanzanie avec ses voisins africains (en particulier ceux du nord, l'Ouganda et le Kenya) se détériorent au fil des années. Les intentions étaient pourtant bonnes puisque ces trois pays ont formé en 1967 la East Africain Community (Communauté est-africaine) dans le but de constituer à terme un marché économique commun. Les premières coopérations visent notamment à uniformiser la politique des changes et de contrôle des devises.

Mais le Kenya, plutôt proche des pays occidentaux, s’éloigne de plus en plus de la Tanzanie soutenue par les communistes chinois, et la frontière entre ces deux pays est même fermée de 1977 à 1983. En Ouganda, Idi Amin Dada, qui nourrit des ambitions d’expansions territoriales, reproche à son voisin tanzanien d’héberger des opposants à son régime. L’Ouganda attaque la Tanzanie à la fin de l’année 1978 et envahit les environs du lac Victoria. Les Tanzaniens, avec l’aide du matériel militaire chinois, parviennent, au bout de plusieurs mois d’efforts, et au prix de lourdes pertes humaines, à reprendre les territoires perdus et occupent même l’Ouganda pendant presque deux ans.

Cette guerre a coûté cher, environ 500 millions de dollars; et au début des années 1980, sans réelle industrie, avec un secteur agricole improductif, la Tanzanie est l’un des pays les plus pauvres de la planète.

Nyerere commence à modifier progressivement sa politique dirigiste menée depuis le milieu des années 1960. L’intervention de plus en plus grande de la Banque mondiale et du FMI, n’améliorent pas forcément la situation, car avec les exigences de la banque mondiale, la société est libéralisée, ce qui ne va plus dans le sens de Nyerere dont l’objectif était justement de s’émanciper du dictat des institutions occidentales, véritable arme de destruction du tissus social des sociétés africaines.

Après avoir renoncé à la présidence en 1985, il reste président du Chama Cha Mapinduzi (CCM), ou parti révolutionnaire, formé en 1977 par la fusion du TANU et du parti afro-shirazi de Zanzibar. Il abandonne la présidence du CCM en 1990.

Malgré des éfforts pour émanciper son pays avec le boycott des puissances occidentales utilisants parfois ses voisins pour l’affaiblir, et sa démission Nyerere conserva jusqu’à sa mort en 1999 l’estime de beaucoup de Tanzaniens et d’une partie de la communauté internationale. On lui reconnaît en effet le mérite d’avoir posé les bases d’un État  pluriethnique.

Source : www.ibe.unesco.org

Par AYONG

Date de dernière mise à jour : 20/05/2019

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