Ciment : environ 2,6 millions de tonnes de production annuelle au Cameroun, par quatre opérateurs

Veffsc

Une production annuelle d'environ 2,6 millions de tonnes de ciment pratiquement équivalente à la demande a été enregistrée en 2016 au Cameroun, pour une capacité installée de 4,2 millions de tonnes par Cimencam, Dangote, Cimaf et Necsen, les quatre opérateurs agréés, selon les estimations officielles.

Cette production est le résultat de l'ouverture du marché camerounais du ciment à la concurrence après plus de cinq décennies de monopole détenu par les Cimenteries du Cameroun (Cimencam), filiale du groupe français Lafarge, depuis les premières années suivant l'indépendance du pays d'Afrique centrale en 1960, et de la mise en service de trois nouvelles usines distinctes entre 2015 et 2016.

Avec ses deux unités de production à Douala, la métropole économique camerounaise, et Figuil (Nord), Cimencam possède une capacité installée officielle de 1,6 million de tonnes par an. En 2016, elle a livré sur le marché pour la consommation environ 900.000 tonnes, a révélé à Xinhua une source ministérielle à l'occasion d'un forum sur le ciment tenu mardi à Yaoundé.

C'est le même volume d'offre annoncé par le management de Dangote Cement Cameroon, filiale locale du groupe appartenant à l'industriel nigérian Aliko Dangote venue briser le monopole de Cimencam en avril 2015, date de l'entrée en service de son usine construite au large du fleuve Wouri à Dangote, notamment face à celle de son concurrent français.

L'usine de Dangote, elle, dispose cependant d'une capacité de production installée de 1,5 million de tonnes l'an. Selon son directeur général, Paavo Wiro, au terme d'un an d'activités en avril 2016, l'entreprise avait acquis "50,18% de parts de marché" du ciment camerounais, au détriment de la filiale de Lafarge.

La demande est estimée à entre 2,5 et 2,8 millions de tonnes l'an avec une projection d'accroissement moyen de 8% en rapport avec les multiples projets d'infrastructures en cours d'exécution et les deux entreprises semblent opérer une stratégie commerciale consistant à stabiliser leurs productions respectives à la hauteur des besoins de consommation afin de préserver leurs marges de bénéfice.

Présente aussi à Douala depuis 2015, l'usine de Ciments d'Afrique (Cimaf) a clôturé sa première année d'activités avec une production de 300.000 tonnes en 2016, a en outre appris Xinhua lors du forum sur le ciment organisé à l'initiative de Dangote Cameroon en marge du 6e Salon international de l'entreprise, de la PME et du partenariat de Yaoundé, plus connu sous le nom de Promote.

Cet investissement marocain offre pour sa part une capacité de production installée de 500.000 tonnes l'an, soit 100.000 tonnes de moins que Necsen, projet turc implanté dans la même ville depuis 2016 où il fournit 300.000 tonnes sur une capacité installée annuelle de 500.000 tonnes, selon les chiffres disponibles au ministère des Mines, de l'Industrie et du Développement technologique.

"Dans ce pays, les décisions sur les investissements traînent", a déploré le directeur général de Dangote Cameroon, en référence à un climat des affaires difficile marqué par un niveau de corruption insoutenable et des lourdeurs administratives, sur lequel la Banque mondiale ne cesse d'interpeller les autorités camerounaises.

OPPORTUNITES D'AFFAIRES

L'implantation des nouvelles usines est pourtant motivée par les opportunités d'affaires qu'offre notamment la multitude de projets d'infrastructures réalisés par ces autorités, dans le cadre du programme politique présidentiel "Vision 2035" qui entend positionner le Cameroun au rang des économies émergentes à l'horizon 2035.

Après Douala, où il déclare un investissement de l'ordre de 220 millions de dollars réparti entre 150 millions pour la construction de l'usine et 70 millions pour le quai, le groupe Dangote, leader du marché du ciment en Afrique subsaharienne, a décidé de renforcer sa présence au Cameroun avec le chantier attendu d'une deuxième usine d'une capacité identique à la première près de Yaoundé.

Il se targue d'avoir favorisé une baisse des prix du ciment sur le marché. De 6.500 francs CFA (environ 10,8 dollars) le prix moyen du sac de 50 kilogrammes du ciment de type 42.5 avant la concurrence dans la capitale, l'on est passé aujourd'hui à un prix compris entre 4.400 et 4.600 francs (7,3 à 7,6 dollars), avance-t-il.

Selon son directeur général toutefois, "il y a un prix du ciment aujourd'hui, pratiqué par plus ou moins tout le monde. Et en effet on ne peut pas aller non plus en dessous de nos prix de revient. Parce qu'aujourd'hui on a investi, tout le monde a investi, c'est ça qui a permis de ne plus importer du ciment, qui était nettement plus cher".

"Donc, aujourd'hui on a fait des investissements et en effet à long terme avec les capacités qui vont arriver, il y aura un supplément, on va certainement pouvoir progressivement commencer à diminuer les prix. Ça veut dire dans les deux ans qui suivent à peu près", ajoute-t-il.

Fin 2015 déjà, le ministre du Commerce s'était plaint en accusant les opérateurs d'entente illicite sur les prix. Les associations des consommateurs emboîtent le pas en dénonçant le fait que les baisses de prix observées ne sont que légères et ne reflètent pas les capacités de production des usines installées.

"Le Cameroun est l'un des pays où le ciment coûte le plus cher en Afrique, malgré la présence de quatre opérateurs", s'est indigné Hervé Nya, président d la Chambre nationale des consommateurs, comparant les prix du marché national à ceux pratiqués en Afrique de l'Ouest, où au Sénégal par exemple le sac de 50 kilogrammes du ciment 42.5 se vend 3.500 francs CFA (environ 5,8 dollars).

FRAUDES ET CONTREBANDE

Pour protéger les investissements réalisés par ces opérateurs, le gouvernement camerounais a décidé d'interdire l'importation du ciment depuis janvier 2016. Mais, les fraudes et la contrebande menacent le secteur. En 2016, la presse camerounaise s'est fait l'écho des accusations faites par Cimencam à l'égard de son concurrent nigérian concernant ces pratiques dans la région de l'Extrême-Nord.

Paavo Wiro, lui, donne une version des faits contraire, dans laquelle il invoque une contrebande opérée par les distributeurs des deux entreprises, qui entraîne une baisse des prix défiant toute concurrence dans cette région.

"Actuellement, a-t-il précisé dans un entretien avec Xinhua, il y a des distributeurs nigérians qui arrivent, sans aucun problème apparemment, en traversant la douane ici sur place. Ça vient du Nigeria, ça vient des distributeurs de Dangote, ça vient des distributeurs de Lafarge. Donc, on a exactement les mêmes problèmes, Lafarge et nous."

"L'année dernière, nous avons démantelé une fabrique de faux ciment, à côté de l'aéroport [de Douala]. Nous avons trouvé des centaines de sacs de faux ciment", a renchéri Ness Essombey, le responsable des relations publiques de l'entreprise.

Cette saisie, menée avec le concours des services camerounais spécialisés de lutte contre la fraude et la contrebande commerciales, avait été estimée à 37 tonnes. "Chaque jour, il y a des endroits comme ça qui se multiplient dans la ville. Nous avons trois ou quatre procès aujourd'hui. Ces gens, nous sommes en train de les poursuivre en justice", a ajouté M. Essombey.

L'offre abondante permet aujourd'hui un marché en permanence ravitaillé en ciment. Finies, les pénuries réelles et artificielles qui provoquaient jadis des tensions chez les consommateurs.

Source...Xinhua

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